La Grande Interview avec Jean-Frédéric Chapuis : « C’est un rêve qui se réalisait de devenir champion du monde ! »

Médaillé d’Or aux Jeux Olympique de Sotchi en 2014, premier français à devenir champion du monde en skicross, l’athlète Jean-Frédéric Chapuis nous emmène à la découverte de sa discipline. Rencontre.

Tout d’abord, à quel âge avez-vous commencé le ski ?

J’ai attaqué le ski je pense vers deux ans et demi, trois ans.

Pourquoi vous êtes-vous dirigé vers ce sport ? Qu’est-ce qui vous a attiré ?

Au début je pense que quand on habite en station, c’est plus facile de faire du ski que du foot. Et puis rapidement, le fait de glisser, de passer du bon temps avec les copains au ski club, ça m’a poussé à continuer le ski. Et puis après il y a eu les bons résultats qui sont venus. Et ensuite petit à petit, j’ai eu de plus en plus de plaisir à faire du ski.

Votre spécialité est le skicross. Pouvez-vous nous expliquer en quoi consiste cette discipline ?

Le skicross, pour faire simple, c’est un parcours de motocross en neige sur une descente de ski où il y a des virages relevés, des sauts. On part quatre par quatre et le but c’est d’arrivé à chaque fois premier en bas. Si on veut une autre image, c’est un peu Mario Kart sur la neige (rire) !

Quels sont les principales difficultés de la pratique du skicross en compétition ?

Il faut être à l’aise en l’air. Parce qu’il y a beaucoup de sauts, il faut arriver à bien amortir les sauts. Il faut arriver aussi à skier à plusieurs. Parce que vu qu’on descend la piste avec trois autres concurrents, il faut arriver à les coller de près si on est derrière pour s’offrir une opportunité de dépassement. Et ça, quand on est entre quatre-vingts et cent kilomètres heures et à moins d’un mètre cinquante de l’autre, ce n’est pas facile. Sachant en plus qu’on ne sait pas trop où on va car celui de devant nous cache la vision. C’est très compliqué.

Qu’est-ce qui vous procure le plus de plaisir dans cette discipline ?

C’est l’adrénaline !  La pression qu’on a au départ, cette confrontation directe. Ça met une pression particulière et quand on réussit on est vraiment très satisfait.

Vous êtes le premier français à devenir champion du monde de skicross. Quel souvenir gardez-vous de ce moment ?

C’est un super souvenir ! C’est ma première médaille, c’est mon premier podium aussi en Coupe du Monde parce qu’avant ça je n’avais fait que des quatrièmes places.

Et puis c’est l’aboutissement, la réussite d’un objectif. C’est un rêve qui se réalisait de devenir champion du monde.

Avec ce titre de champion du monde, la pression et l’attente autour de vous étaient-elles devenues plus grandes d’un coup ?

Oui forcément il y a eu plus d’attente parce qu’on passe entre guillemets d’un outsider à quelqu’un de favori. Et forcément quand on l’a fait une fois, les gens s’attendent à ce qu’on le refasse plusieurs fois. Même si c’est très difficile. Chaque course est différente. Donc oui il y a plus d’attente et il y a un peu plus de pression.

Est-ce difficile d’assumer ce statut de champion du monde quand on arrive en compétition ?

Ce n’est pas facile de l’assumer. Après, je pense que le prendre de la meilleure des manières c’est de se dire que si on l’a fait une fois, pourquoi on n’arriverai pas à le faire une deuxième fois ?

Et s’en servir en se disant que les adversaires ont finalement plus peur de moi sachant que j’ai été champion du monde. Parce qu’il se disent :  » ah tiens c’est le champion du monde qui est face à moi  » .

L’esprit de compétition a-t-il toujours été en vous, où vous l’a-t-on inculqué plus tard ?

Je pense que je l’ai eu rapidement. L’esprit de compétition n’était peut-être pas très marqué au début mais au fil des années, il a dû se développer et puis maintenant forcément c’est un bon esprit de compétition. Et je n’aime pas trop perdre (rire) !

Faire du skicross votre métier à t-il toujours était une évidence pour vous ?

Non, parce qu’au début je faisais vraiment du ski sous forme d’un loisir. C’était plus un objectif de réussir dans le ski.

Au début je faisais du ski alpin. Et ensuite, en 2010, quand j’ai vu que le skicross devenait olympique, j’ai changé et cette discipline me convenait beaucoup mieux que le ski alpin. Et puis petit à petit, c’est devenu mon métier. Et je suis très content de le faire. J’associe vraiment plaisir et travail, même s’il y a quand même beaucoup de sacrifices pour arriver là.

A ce propos justement, quels sacrifices cela représente-il pour atteindre le haut niveau ?

Ce sont d’énormes sacrifices, sachant qu’on a quatre mois de courses dans l’année et six sept mois où l’on ne fait que de l’entraînement pour arriver prêt pour ces quatre mois.

Ça demande une hygiène de vie particulière, un programme adapté. On ne peut pas faire tout ce qu’on veut. Il y a forcément des concessions à faire mais dès qu’on arrive derrière à avoir des bons résultats, ça gomme tous ces sacrifices.

En 2014, à Sotchi vous disputez les Jeux Olympiques et vous remportez la médaille d’Or en skicross. Participer à des Jeux Olympiques, c’était un rêve pour vous ?

C’était un de mes rêves de participer à des Jeux Olympiques. Et puis j’avais un autre rêve, celui de devenir champion Olympique. Et j’ai réussi à tout faire d’un coup.

C’était vraiment génial parce qu’avant je me disais qu’est-ce que ça devrait faire de devenir champion olympique ?  Qu’est-ce que ça doit faire de monter sur la plus haute marche du podium aux Jeux ? Et là, j’ai pu le vivre. C’est quelque chose de géniale ! En plus avec deux autres français, deux autres bons copains. Ça reste des énormes souvenirs. Et j’espère peut-être un jour arriver de nouveau à revivre ces souvenirs.

Justement, à quoi pense-t-on quand on monte sur le podium, médaille d’Or autour du cou et avec en toile de fond l’hymne national de notre pays qu’on représente qui résonne ?

On est très fier. Après, je ne cache pas que tout arrive en même temps. Et des fois on a du mal à réaliser vraiment ce qu’il se passe. Il faut beaucoup de temps pour réaliser. On essaye de savourer au maximum le moment présent.

Comment se passe la vie aux Jeux Olympique au quotidien ?

On est partagé entre regarder, parce qu’on en prend plein les yeux tous les jours. Quand on a pas encore fait les Jeux Olympiques, on découvre plein de choses : la vie au village, la grandeur des Jeux Olympiques.

Après, il y aussi le fait qu’on doit rester concentré et se préparer au maximum pour la course pour éviter tous ces trucs qui parasitent, qui bouffent de l’énergie à côté. Donc il faut vraiment arriver à gérer du mieux possible son temps. Finalement on peut vraiment profiter des Jeux Olympiques qu’une fois qu’on a fini notre épreuve.

Comment gère-t-on la pression d’un tel événement ?

Oui, c’est beaucoup de pression parce qu’on se dit que cette chance ne se présente que tous les quatre ans. Et puis c’est la course qu’il faut gagner si on a envie que le grand public retienne notre nom. Et au-delà de ça, c’est plus un objectif personnel et forcément que ça met beaucoup de pression. Après, il faut faire avec et il faut essayer de la gérer du mieux possible. Donc des fois ça marche, d’autres fois ça marche moins bien.

Dans votre riche palmarès, vous avez également remporté trois Coupes du Monde. Aujourd’hui vous avez donc gagné tous les titres possibles en skicross. Y a-t-il encore quelque chose qui vous manque à accomplir ? Un record à aller chercher ?

Je ne regarde pas trop les records. Ça ne m’intéresse pas trop. Moi je fais année par année et chaque année il y a de nouvelles choses à aller chercher. Il y a des nouveaux titres à aller gagner. J’ai déjà trois Globes de Cristal mais mon objectif ce n’est pas de m’arrêter là. C’est d’arriver à nouveau à le gagner cette année. Et puis c’est de profiter au maximum à chaque course, et on verra bien où ça me mène.

Dans quels domaines avez-vous l’impression de pouvoir encore progresser aujourd’hui ?

Il y a encore plein de domaines. Ce n’est que des petits détails qu’il faut améliorer de partout. Sur les départs, sur la technique en ski, sur le ski à plusieurs. En fait, partout je peux progresser et on peut toujours faire mieux.

Selon vous, quels sont vos points forts et points faibles en compétition ?

Mes points forts ce sont mes départs et ma technicité. Ma technique de ski me permet de me créer des opportunités de dépassement.

Après, mon point faible, je dirai peut-être ma taille. Et notamment pour mieux amortir les sauts, j’ai des petites jambes mais on fait avec.

A quelle vitesse allez-vous lors d’une descente en compétition ?

Je pense qu’on doit être autour de 80km/h de moyenne. En faisant des pointes autour de 100km/h.

Ce qui laisse très peu de place à l’erreur…

Oui, vaut mieux ne pas en faire ! Il faut éviter de faire des erreurs, après on s’entraîne pour ça, on se prépare pour ça. On n’est pas à l’abri d’une erreur mais ça fait partie du jeu.

Comment s’organise vos séances d’entraînement dans la semaine ?

Cela dépend des périodes. Il y a des périodes où l’on ne fait que de la préparation physique, en été par exemple pour justement se construire un corps pour encaisser les chutes. Et surtout être performant.

Et après sinon c’est beaucoup d’entraînements sur le ski avec des journées de slalom Géant pour parfaire la technique. Et des journées de skicross où là on s’entraîne sur les départs, sur les sauts.

Avez-vous une préparation mentale spécifique avant d’aborder une compétition ?

J’ai ma routine. Après, elle est propre à chaque athlète. Chacun essaye de gérer la compétition du mieux possible. Et chaque compétition est différente.

J’ai une routine, et forcément elle peut changer. Je l’adapte du mieux possible en fonction de ma situation. Il y a des jours où je suis plus stressé que d’autres, d’autres où je suis plus détendu. J’utilise les outils que l’on m’a donnés, que le préparateur mental m’a donnés.

Vous avez été fait également Chevalier de l’ordre de la Légion d’honneur. Qu’est-ce que cela représente pour vous ?

C’est une fierté, parce que déjà c’est une reconnaissance de la Nation. Et puis forcément on est content d’avoir représenté la France. C’est vraiment beaucoup de fierté !

Enfin, quels sont vos prochains objectifs ?

Moi je fonctionne année par année. Donc cette année il y aura à nouveau le Globe de Cristal à aller chercher et puis les championnats du monde début février aux États-Unis où j’espère aller chercher une médaille.

Propos recueillis par Alexandre HOMAR

 

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