La Grande Interview avec Manon Petit-Lenoir : « Disputer les Jeux Olympiques est mon plus grand rêve ! »

Championne de France Cadette et Junior de Géant parallèle en 2014, médaillée d’Or aux Jeux Olympiques de la Jeunesse en 2016, Vice-championne du monde de boardercross en 2017, la snowboardeuse Manon Petit-Lenoir nous emmène à la découverte de sa discipline. Ses débuts, ses premiers titres, l’entraînement, Manon Petit-Lenoir aborde tous les sujets qui jalonnent sa vie de sportive de haut niveau. Avec ses hauts et ses bas à l’instar de sa terrible blessure survenue en avril dernier. Rencontre.

Tout d’abord, à quel âge avez-vous commencé le snowboard ?

J’ai commencé à l’âge de sept-huit ans. Avant je faisais du ski en club.

Pourquoi vous êtes-vous dirigée vers ce sport ? Qu’est-ce qui vous a attiré dans cette discipline ?

Au tout début, je faisais un peu de tout. Je faisais du Géant, du Boarder. Et c’est vrai que le Géant en France, il y en a peu qui le pratique. Et j’aimais bien le coté course, le coté du boarder à quatre, où les deux premiers qui arrivent passent au run suivant. C’était vraiment ce qui m’attirait.

Très vite, vous vous dirigez vers le boardercross. Pouvez-vous nous expliquer en quoi consiste cette discipline ?

On part à quatre ou à six dans le même parcours. Il y a des sauts, des mouvements de terrains, des virages. C’est assez complémentaire comme sport. Les deux ou trois premiers qui arrivent peuvent accéder à la course d’après, jusqu’à la finale.

Quels sont les principales difficultés de la pratique du boardercross en compétition ?

Déjà c’est dangereux. Et c’est compliqué à gérer parce qu’on est tous dans le même parcours et on ne sait pas trop ce que les autres vont faire. Donc c’est vrai qu’il faut un peu élaborer une stratégie. Savoir ce que les autres vont faire, où c’est que tu peux doubler, prendre l’aspiration. Il y a beaucoup de choses qui rentrent en compte et parfois c’est vraiment aléatoire. On peut très bien faire une belle course et la personne devant toi tombe et du coup te fait tomber. C’est vraiment assez aléatoire.

Où prenez-vous le plus de plaisir dans cette discipline ?

L’adrénaline avant de partir. C’est vrai que quand on est à plusieurs dans les starts, on se regarde, on se dit « bon bah allez, va falloir que je sois le plus rapide ! ».

Puis après il y a aussi l’aspect vitesse, l’aspect stratégie, de doubler, de réfléchir super rapidement parce qu’au final pendant une minute, une minute quinze ça dépend des boarders, il faut donner tout son maximum et il faut réussir à mettre en place quelque chose pour aller plus vite et c’est vrai que tout ça, c’est vraiment attirant.

En 2013, vous participez et finissez troisième aux Championnats de France Kids qui se déroulent à Isola 2000. Vous étiez alignée en boardercross et en Géant parallèle. Quels souvenirs gardez-vous de ces championnats ?

Ça remonte un peu loin ça. Je crois que c’est une année où j’avais gagné toutes les courses. Je n’en avais pas perdu une seule. J’y suis peut-être allé un peu stressée et du coup c’est vrai que j’étais un peu déçue d’avoir fini troisième. C’est le souvenir que j’en garde. Quand j’étais petite, les Championnats de France, c’était l’événement à ne pas rater. J’étais quand même contente de faire un podium, mais j’espérais mieux comme résultat.

Jeune, vous faisiez déjà partie des meilleures ?

Je dirai que je n’étais pas la plus douée, mais j’ai beaucoup travaillé pour y arriver. Tous mes efforts payaient. Et il y a vraiment eu une année déclic. Au tout début je faisais vraiment ça pour le loisir. Quand je gagnais c’était cool mais sans plus. Et il y a vraiment eu une année où j’ai eu un déclic, c’était en troisième. Là je me suis vraiment dit que je voulais vraiment faire ça, que j’aimais bien gagner.

Quel regard vos amis portaient-ils sur votre parcours et vos compétitions ?

Ils ont toujours aimé ce que je faisais. Ils m’ont toujours suivie, encouragée. Même encore maintenant. J’ai un petit fan club qui commence à être gros maintenant. Et ils sont toujours là à venir m’encourager, et ils me suivent tout le temps partout.

2014 marque un véritable tournant dans votre carrière. Vous devenez Championne de France Cadette et Junior de géant parallèle. Tout d’abord, pouvez-vous nous expliquer en quoi consiste le Géant parallèle ? Et qu’avez-vous ressenti à ce moment-là ?

Le Géant parallèle, c’est un Géant avec des portes bleus et des portes rouges. Et on est deux à prendre le départ. Il y a deux parcours l’un à coté de l’autre. Et donc c’est vrai qu’il y a un peu une rivalité parce qu’on voit quand on fait le Géant parallèle la personne à coté et on sait si on est premier ou deuxième. Du coup on se donne jusqu’au bout.  C’est bien parce qu’il n’y a pas de contact.

J’étais vraiment très contente d’avoir gagné. Je m’étais fixé l’objectif de gagner en Géant parce que j’aimais bien cette discipline.

Cette année-là, vous intégrez également l’Équipe de France. Comment avez-vous réagi quand vous avez appris que vous intégrerez l’Équipe de France ?

C’était mon objectif donc j’étais vraiment très heureuse ! C’est cool d’y être arrivée.

Quel sentiment cela vous fait de pouvoir représenter votre pays à travers le monde au cours des différentes compétitions ?

C’est une fierté. C’est un honneur de pouvoir diffuser les couleurs de la France. C’est vraiment chouette de pouvoir porter haut et fort les couleurs de notre pays.

L’esprit de compétition a-t-il toujours été en vous, où vous l’a-t-on inculqué plus tard ?

Non, je l’ai toujours eu. Même quand j’étais petite, avec mon frère on se chronométrait pour mettre la table, le premier qui vidait le lave-vaisselle. J’ai toujours voulu gagner et c’est vrai que j’avais un frère plus grand du coup ça m’a poussé vers le haut. Je déteste perdre !

En 2015, vous remportez la médaille d’Or en Équipe au Festival Olympique de la jeunesse Européenne. Pour vous, disputer les Jeux olympiques c’est votre plus grand rêve ?

Oui, disputer les jeux Olympiques est mon plus grand rêve. C’est un peu l’aboutissement d’une carrière. Alors c’est sûr qu’il n’y a pas que ça, il y a les Coupes du Monde, les Globes de Cristal mais c’est vrai que les Jeux Olympiques, c’est le but ultime. J’aimerai y participer au moins une fois dans ma vie. Je n’en n’ai pas eu la chance cette année mais je sais qu’elle se représentera ou tout du moins je mettrai tout en œuvre pour y arriver.

En effet, une blessure en octobre 2017 aura eu raison de vous et vous empêchera de participer à vos premiers Jeux Olympiques. Puis en avril dernier, vous vous blessé gravement à la suite d’une lourde chute au cours des championnats de France de snowboard. Une chute qui aura de lourdes conséquences pour vous : quatre fractures et trois mois d’immobilisation. Comment avez-vous vécu les jours qui ont suivi votre chute ?

Oui, je m’étais déjà blessé au mois d’octobre 2017 au genou. Et je n’ai pas pu faire la saison à 100% parce que mon genou me faisait vraiment mal. Ça a donc malheureusement compromis ma place aux Jeux Olympiques.

Et en avril dernier, je me suis à nouveau blessée. Je suis rentrée à la maison parce que je pensais que ça allait, que je m’étais juste légèrement déplacée quelque chose dans le dos. Mais je pensais vraiment à rien de grave. Je suis allée à l’hôpital le lendemain. Et là, je n’ai pas compris ce qui m’arrivait quand ils m’ont dit que je ne pourrai plus bouger pendant trois mois. Le dos et le cou étaient en fait très mal en point à la suite de cette chute en compétition. Et à ce moment-là, ça a été vraiment compliqué. Après, j’ai eu la chance d’être bien entourée.

Comment vit-on une période comme celle-ci ?

C’est super difficile parce que là je ne pouvais plus rien faire. Je ne levais même plus les bras tellement que j’avais mal. J’étais en corset donc je dormais dans un fauteuil. Mes parents m’ont lavé pendant trois mois. J’étais vraiment repartie à zéro. Je m’alimentais au biberon. C’était vraiment une période horrible.

Depuis votre lourde chute, est-ce que vous appréhendez maintenant de retomber lourdement  quand vous êtes en compétition ?

Non, du tout ! Je suis vraiment passée à autre chose. J’ai eu peur les trois premiers jours quand je suis remontée dans la neige. Et puis de toute façon, si ça doit arriver, ça arrivera, je ne peux pas contrôler. Après, j’ai beaucoup travaillé avec mon coach aussi. Pour le moment je n’ai pas eu d’appréhension après ma blessure.

On sent chez vous que rien n’est laissé au hasard. Vous mettez toujours tout en œuvre pour optimiser vos chances de victoire. En atteste ce moment important de votre vie : vos dix-huit ans. Pour arriver dans les meilleures conditions possibles à la Coupe du Monde, vous avez décidé de faire une impasse sur la fête de vos dix-huit ans. Racontez-nous ce choix fort…

C’est vrai que ça fait des années que mon anniversaire ne tombe pas vraiment au bon moment. Ça tombe toujours au début de la Coupe du Monde. Du coup, je décide tout le temps de faire l’impasse dessus. Ce n’est pas très grave en soi. De toute façon, la vie de haut niveau nous demande de faire des sacrifices. Et ne pas fêter son anniversaire en fait partie.

Atteindre le sport de haut niveau, c’est donc aussi être capable de faire de nombreux sacrifices ?

C’est exactement ça. On en fait tout le temps. Il y a tout le temps des choses qu’on aimerait beaucoup faire et que finalement on ne peut pas. C’est le jeu et puis on sait pourquoi on le fait. Cette année, j’aurai beaucoup aimé partir en vacances après une saison si difficile, et je n’ai pas pu. J’ai finalement eu trois mois de corset et cinq mois de rééducation et de réathlétisation pour revenir au plus haut niveau. Mais dès dès qu’il y a des victoires c’est encore plus beau parce que ça nous fait oublier tous ces mauvais moments parfois.

Le snowboard, c’est une remise en question permanente ?

Oui, bien sûr. On analyse un peu tout pour voir comment on peut faire mieux pour la prochaine fois. Après une course, on regarde beaucoup les vidéos pour regarder ce que j’aurai pu faire de mieux. Et puis souvent, une course précède une autre. Du coup on essaye d’apprendre de nos erreurs pour ne pas refaire les mêmes le lendemain. On se remet souvent en question, sinon on ne pourrait pas avancer.

Quel est le titre aujourd’hui dont vous êtes la plus fière ?

Je suis championne olympique en Équipe de la jeunesse Européenne. Ça c’est un titre qui restera toujours gravé parce que c’était vraiment un moment fort.

Après, au niveau de la valeur, je pense que les Mondiaux il y a deux ans à Sierra Nevada c’est super. Je fais Vice-championne du monde adulte avec ma collègue, Charlotte Bankes. Et puis je fais une cinquième place le jour d’avant en individuel. C’était vraiment beau.

Et puis sinon avant de me blesser, j’ai fait mon premier podium en Coupe du Monde ce qui était aussi vraiment chouette. Il y avait une cinquantaine de personnes qui étaient venu me voir. C’est quelque chose que je garderai aussi en mémoire.

Que vous apporte votre entraîneur actuel tant sur le plan sportif que personnel ?

Il m’apporte énormément de choses en technique, sur le plan personnel et à me dépasser.

Aujourd’hui, qu’aimeriez-vous dire à toutes ces filles, petites ou grandes, qui ont envie de faire du snowboard leur métier ? Quels conseils leur donneriez-vous ?

D’aller au bout de leur rêve. Si vraiment elles ont envie de faire ça, qu’elles se donnent les moyens au bout d’un moment ça payera. Persévérer aussi.

Si ça ne marche pas une année, ça marchera l’autre si on s’entraîne et que l’on veut vraiment y arriver.

Dans quels domaines avez-vous l’impression de pouvoir encore progresser aujourd’hui ?

Partout. Je pense qu’on n’est jamais parfait et qu’on a tout le temps du travail à faire.

Selon vous, quels sont vos points forts et points faibles ?

Je suis persévérante. Je ne lâche jamais rien. Je peux être derrière, à dix mètres de mon adversaire, je vais quand même me donner à fond pour essayer de doubler sur la fin. Je suis vive. Je suis assez bonne dans les lignes de start. C’est-à-dire que j’ai un temps de réaction assez rapide et ça m’aide vraiment à être bonne sur les lignes de start.

Après mes points faibles, j’en ai aussi. Je manque encore un peu de physique. En plus après ma blessure, je suis repartie de zéro et il faut que je m’entraîne à fond pour pouvoir reprendre tous mes muscles, et plus encore. Et j’ai encore plein de points techniques à mettre en place pour pouvoir y arriver et aller encore plus vite.

Comment s’organise vos séances d’entraînement dans la semaine ?

Ça dépend. Quand on part en stage de snowboard, souvent le matin on monte tôt le matin jusqu’à 14 heures. A 14 heures on rentre, on mange et après on retourne faire une séance l’après-midi de sport. Avant d’aller faire nos plans, de s’étirer, de faire une récupération, d’aller manger, de se coucher et de recommencer le lendemain.

Sinon, quand je suis à la maison, le matin je ne me lève jamais vraiment trop tard. Et je vais tout de suite faire une séance. Et l’après-midi, j’essaie de faire une autre séance. Ça dépend vraiment des jours. On a un programme et on le suit.

L’entraînement varie-t-il en fonction des compétitions ? Avez-vous un entrainement différent selon que ce soit des Championnats du monde ou des Jeux Olympique où les entraînements sont toujours pareils ?

Ça se ressemble quand même assez souvent. Mais après, on a vraiment un programme. Souvent, quarante-huit heures à l’avance, on a une séance spécifique pour le type d’entrainement le lendemain ou le type de course.

Avez-vous une préparation mentale spécifique avant d’aborder une compétition ?

Oui, j’ai un coach mental. On travaille ensemble avant chaque compétition sur différents points, sur ce qui me stresse, comment aborder les courses. Et c’est je pense un travail à l’année pour que ça fonctionne le jour des courses.

Avez-vous un petit rituel avant le début de chaque course ?

Oui j’en ai un. Quand je suis dans les start, j’aime bien taper ma planche par terre et tourner la tête à gauche, à droite, super rapidement. C’est des petits trucs bêtes mais on en a tous je pense.

Y a-t-il une ou un sportif à qui vous souhaiteriez ressembler ? Et pourquoi ?

Il y a beaucoup de gens que j’admire. Il y a énormément de sportif que je trouve qu’ils sont vraiment top. Après je n’ai pas non plus d’idéal parce que je pense que chaque sportif est différent. On a chacun des qualités et défauts différent. Du coup c’est difficile de pouvoir se dire « j’ai envie de ressembler à cette sportive ».

Enfin, quels sont vos prochains objectifs ?

Déjà, faire des résultats sur des Coupes du Monde. Et puis on a les Championnats du Monde cette année aux États-Unis. J’aimerai beaucoup y participer et en plus ramener une médaille, ça serait top.

Propos recueillis par Alexandre HOMAR

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