Cinq fois champion du monde d’Ultra Triathlon, Pascal Pich s’est lancé dans un nouveau challenge depuis ce deuxième confinement. L’idée : parcourir un Tour de France virtuel sur son vélo d’appartement. Composé de trente étapes, il nous détaille tout du long de cet entretien le concept de ce défi. Et vous invite à le suivre et le retrouver en action sur les différents lives qu’il organise sur ses réseaux sociaux avec son opération #jeviensdormirchezvous. Rencontre.
Cinq fois champion du monde d’Ultra Triathlon, vous avez décidé de lancer, pour ce deuxième confinement, le défi #jeviensdormirchezvous. Tout d’abord, en quoi consiste ce défi ?
L’idée est de créer du lien avec des gens confinés. C’est comme ça que j’ai eu l’idée de faire une sorte de Tour de France. J’ai proposé aux gens qui me suivent sur les réseaux sociaux de se porter volontaires pour que je vienne dormir chez eux virtuellement. Ils sont une trentaine à s’être portés volontaires. De là, j’ai ensuite pu tracer un tour de France.
Chaque jour je vais virtuellement d’une ville à une autre. En revanche, le pédalage lui n’est pas virtuel (Rires). Je pédale dans mon salon et on fait des lives sur les réseaux sociaux durant l’étape. Et plus particulièrement sur Facebook. Les gens viennent se connecter et l’on discute ensemble. Cela créé un vrai lien.
Et le soir on fait un live sur Instagram. Durant ce live je suis en duo avec la personne qui m’héberge. Elle nous explique pourquoi elle avait envie de participer au défi. Et on essaye également de mettre en avant un restaurateur local. L’idée était aussi de mettre en avant les restaurateurs qui sont en souffrance en ce moment avec cette crise sanitaire.
Comment vous est venue l’idée de ce challenge ?
Des idées, j’en ai 200 000 dans ma tête (Rires) !
Tous les mercredis soir, je fais un live sur mon Facebook avec mes abonnés. Et lorsque le Président de la République a parlé, j’ai fait mon live une trentaine de minutes après. Et j’ai lancé l’idée comme ça, en disant qu’on allait faire un défi qui consiste à faire le Tour de France, que j’allais venir chez les gens virtuellement. Et je leur ai demandé ce qu’ils en pensaient. Tout le monde s’est montré très enthousiaste de cette idée et du concept.
Après on a peaufiné le projet et on peaufine encore puisque sur les trois premières étapes je ne faisais pas encore de live le soir en tête à tête avec les gens.
Combien d’étapes comporte ce challenge ?
Il y a trente étapes en tout.
Ce défi est destiné également à soutenir les restaurateurs. Mettre en avant les restaurateurs est quelque chose qui vous tient à cœur. Lors de la douzième étape, c’est Olivier de Provins qui vous reçoit virtuellement. Il est restaurateur et, pour reprendre ses mots, se définie comme « un athlète du commerce ». Racontez-nous en quoi vous vous retrouvez dans la profession d’Olivier ? Il y a notamment cette similitude qu’on peut mettre en parallèle j’imagine entre leur engagement physique sans relâche dans leur profession et votre engagement sans relâche dans votre discipline ?
Tout-à-fait ! On le voit d’ailleurs encore plus en ce moment. Eux, s’ils ne travaillent pas, s’ils ne s’entraînent pas on va dire, ça ne fonctionne pas. Un athlète c’est pareil. S’il ne peut pas s’entraîner, s’il ne peut pas aller nager, pédaler, courir pour ma part puisque je pratique le triathlon, c’est très compliqué. Donc on est tous un petit peu dans le même bateau.
Moi je n’ai pas le droit de sortir. Je suis athlète de haut niveau mais c’est une discipline un peu particulière donc on n’est pas sur les listes du Ministère des Sports. Donc pour le coup je n’ai pas d’autorisation spéciale pour aller dehors et pédaler de nombreuses heures. Moi, mon quotidien est fait de grosses sorties. Donc il fallait bien que je fasse et trouve quelque chose. Comme certains restaurateurs qui essayent un peu de sauver la mise en faisant des plats à emporter.
Chacun essaye de sauver son boulot comme il peut. C’est vrai qu’entre eux et moi, il y a d’une certaine façon une similitude.
Durant les étapes, vous réalisez un live sur Facebook. Que partagez-vous avec nous durant ce live ? J’imagine que ces lives sont une bonne façon de se sentir moins seul et de casser un peu la monotonie qu’il peut y avoir de pédaler seul chez soi…
Exactement. Je réalise en fait plusieurs lives. J’en fais un premier au départ. Et suivant la longueur de l’étape, j’en fais un ou deux durant l’étape. Enfin, je fais un dernier live que je commence à 10km de l’arrivée pour terminer avec mes abonnés.
L’idée c’est vraiment de créer du lien, on parle, on discute de divers sujets. Ils posent des questions et je réponds. Il y a des questions sur le sport, sur l’actualité, sur la solitude aussi. Et j’ai l’impression qu’il y a un noyau dur parmi les gens qui me suivent et on commence à être un peu comme une famille maintenant. Quand untel ou untel se connecte, je sais ce qu’ils font dans la vie, où ils vivent, c’est devenu un vrai noyau familial. Il y a un vrai lien qui se crée et je trouve ça juste génial. Moi je suis quelqu’un qui aime les gens !
Et c’est vrai que ça rompt aussi la monotonie. Parce qu’en général, le live dure entre quinze et trente minutes. Durant ces minutes, je ne vois pas le temps passer. Et quand j’ai une étape de 400 bornes, que je passe plus de dix heures sur le vélo, ça fait du bien de passer quinze minutes ou une demi-heure à discuter avec les gens.
J’ai vu qu’il vous arrive même de prendre la guitare et de chanter du Christophe ou du Johnny sur votre vélo…
(Rires) ! Alors moi souvent ce que je fais, et c’est un exercice que je fais faire aux athlètes que j’entraîne, je leur fais faire du travail d’apnée. Et la meilleure façon de faire de l’apnée sur le vélo, c’est de chanter. Parce qu’il faut aller chercher un souffle différent, aller chercher de l’air autre part. Donc pour passer mon temps, je me fais des karaokés. J’en ai diffusé un sur un live. Et des personnes m’ont demandé si je ne pouvais pas chanter du Christophe et du Johnny, et c’est ce que j’ai fait. Une autre personne m’a demandé si je ne pouvais pas jouer de la trompette et comme je suis réserviste à la Légion Étrangère, j’ai joué du clairon. L’idée c’est aussi de faire plaisir aux gens, d’essayer de répondre à leurs sollicitations. Et puis moi j’aime bien délirer (Rires) !
Le soir, vous prenez la direction d’Instagram pour un nouveau live avec la personne qui vous héberge virtuellement. Tout d’abord comment choisissez-vous ces personnes ?
C’est eux qui se sont portés volontaires au début. Ce qui représente une trentaine de personnes. Et ensuite je leur demande de trouver un restaurateur ou un commerçant local pour qu’il vienne nous témoigner des difficultés qu’il rencontre actuellement.
Parmi ces témoignages, on y retrouve également des expériences de vie assez incroyables. Je pense par exemple à Cédric qui vous reçoit virtuellement à Albi lors de votre 5eme étape. Cédric a subi une greffe de cœur et nous donne une incroyable leçon de vie à travers son récit. Tout d’abord, pouvez-vous nous raconter votre rencontre avec Cédric ?Comment avez-vous pu l’aider dans sa pratique du sport ?
J’ai rencontré Cédric sur une organisation au profit des personnes qui avaient des pathologies cardiaques et des greffes cardiaques. L’idée était de monter le célèbre Mont Ventoux au mois de septembre dernier. Les personnes qui avaient des pathologies pouvaient le monter avec un vélo à assistance électrique. On a sympathisé, et comme je suis également coach sportif et diététique, il m’a demandé si je voulais bien l’entraîner, le préparer pour les Championnats de France des greffés cardiaques. J’ai trouvé son histoire vraiment belle donc j’ai accepté. Depuis, on a vraiment créé un lien particulier. Moi j’aime bien les choses qui sortent de l’ordinaire. On a tous en nous une histoire, quelque chose de particulier et c’est ça qui m’attire.
Vous avez à cœur, à travers ces échanges virtuels en fin d’étapes, de partager avec vos abonnés différents parcours de vie et montrer qu’il n’y a pas qu’une seule et unique voie pour pratiquer le sport ?
Oui, complétement.
Quels conseils donneriez-vous aux gens qui souhaiteraient faire du sport chez eux ? Quels exercices faciles à faire conseilleriez-vous ?
Il y a plein de choses. Par exemple, pour les personnes qui habitent dans des immeubles, la chose la plus facile, on peut descendre au rez-de-chaussée, monter jusqu’au troisième, quatrième ou cinquième ou peu importe le nombre d’étages qu’on a. Et faire ça plusieurs fois. Là on a déjà fait un exercice. Monter des marches, musculairement c’est un vrai exercice physique.
Après ceux qui ont des vélos d’appartement, ils peuvent pédaler. Alors je ne parle pas de faire 400 bornes mais on peut très bien faire une demi-heure, quarante minutes.
Ceux qui ont des tapis de marche ou de course, ils peuvent le faire.
On a le droit à une heure dehors. Dans ce cas, on regarde autour du pâté de maison ce qu’il est possible de faire. Et soit on est capable de courir et on trottine un petit peu. Mais on peut aussi tout à fait marcher, mais marcher un petit peu plus vite que ce que l’on fait quand on va chercher le pain par exemple. Et puis il est aussi possible chez soi de faire des abdominaux, des pompes etc…
L’important je pense c’est d’avoir une activité physique. Moi j’ai toujours fait du sport et je le dis souvent, je n’ai pas vu un médecin depuis quinze ans ! Sauf cas extrême comme des fractures, je n’en n’ai pas vu un depuis quinze ans. Le fait de pratiquer une activité physique, même si elle n’est pas extrême et de haut niveau, c’est un gage de bonne santé.
Enfin, quels sont vos prochains projets à venir ?
J’en ai surtout un sur lequel je travaille depuis longtemps, qui devait normalement démarrer en mai dernier, je croise les doigts pour qu’il puisse démarrer en mai prochain. Tout va dépendre de comment va évoluer la situation sanitaire. L’idée est de faire dix déca Iron Man en une année. Un déca Iron Man c’est : 38 km de natation, 1800 km en vélo et 423 km de course à pied. Je veux faire ça dix fois donc en une année, ça veut dire à peu près un, tous les quarante jours ! Et pour corser encore plus la chose, je ferai le vélo sur home-trainer et la course à pied sur un tapis de course à pied. Psychologiquement c’est beaucoup plus compliqué. C’est quelque chose où l’on est face à soi et où l’on ne peut pas tricher.
Propos recueillis par Alexandre HOMAR.