Rencontre avec Amandine Brossier : « On court aussi pour le partage des émotions qu’on peut transmettre. »

Photo en Une délivrée par l’athlète.

Championne de France du 400m en salle en février dernier, Amandine Brossier nous emmène à grandes enjambées à la découverte de sa discipline : l’athlétisme. Tout du long de cet entretien, Amandine Brossier revient sur son parcours depuis qu’elle a débuté sa carrière : son titre de championne de France obtenu il y a quelques mois sur 400m, son titre de championne de France obtenu sur 200m en salle en 2018 et tout ce qui fait d’elle l’athlète qu’elle est devenue aujourd’hui. Une interview où elle nous présente et décrypte sa spécialité, le 400m. Et toute la discipline qu’exige la pratique de cette distance. L’occasion également pour Amandine Brossier de nous sensibiliser sur l’importance de la sauvegarde de notre planète. Rencontre. 

Tout d’abord, à quel âge avez-vous commencé l’athlétisme ?

J’ai commencé l’athlétisme à l’âge de dix-neuf ans. Avant, je faisais du basket. 

Pourquoi vous êtes-vous dirigée vers ce sport ? Qu’est-ce qui vous a attiré dans cette discipline ?

J’aimais bien courir. J’accompagnais souvent mes parents sur les courses en fond quand il y avait des 10km ou des semi-marathons. J’ai toujours aimé ça. 

Après, j’ai aussi toujours aimé les compétitions. C’est pour cela que j’ai choisi de faire un sport en compétition. De mes six ans à mes dix-neuf ans, j’ai fait du basket. Je suis de la région choletaise. Je suis venue sur Angers pour mes études. Je continuais quand même le basket à Cholet mais je ne faisais qu’un entraînement par semaine. Donc je voulais changer. 

Et c’était un peu un défi personnel de changer de sport à cet âge-là, de commencer très tard. C’était un défi personnel que je m’étais lancé et ça a marché ! (Rires)

A partir de quel moment avez-vous compris que vous aviez le niveau pour atteindre le haut niveau ?

C’est venu naturellement, j’étais très attentive, très à l’écoute des conseils que l’on pouvait me donner. Je me nourrissais de tout ce qu’on pouvait me donner puisque c’étaient des exercices que je n’avais pas du tout l’habitude de faire. 

Au fur et à mesure, je me suis qualifiée pour les Championnats de France, après j’ai fait des podiums. On va dire que j’ai commencé à comprendre que je pouvais atteindre un haut niveau dès lors que j’ai eu ma première sélection en Équipe de France Jeunes aux Championnats d’Europe Espoirs. C’était en 2017. C’était ma troisième année d’athlétisme. C’est vraiment à partir de ce moment-là que je me suis dit que je pouvais atteindre le haut niveau.  

Très vite vous allez vous spécialiser sur le 400m. Tout d’abord, pourquoi avez-vous décidé de faire du 400m votre spécialité ?

En premier lieu, je n’ai pas fait du 400m. J’ai d’abord fait du 100m et du 200m parce que c’est un peu ce que je connaissais le plus. J’en avais fait un peu au lycée en compétition. Pour moi, si l’on veut courir vite, ce sont vers ces disciplines que l’on va se tourner. Et quand je me suis aperçu que je ne serai pas suffisamment bonne pour concurrencer les meilleures sur 100m, je me suis plus rapprochée du 200m.

Et ensuite, pas mal de coaches me disaient que je devais essayer le 400m et que cela me réussirait bien parce qu’à la fin de mes 200m, on sentait que j’en avais encore un peu sous la semelle. 

J’ai donc commencé le 400m lors de la saison 2018-2019, un an avant les championnats du monde de Doha. C’est venu naturellement. Au début de la saison où je préparais un 200m on s’est dit qu’on allait préparer un 400m pour préparer et lancer la saison. J’avais fait un assez bon chrono qui m’a permis de me qualifier aux Jeux Méditerranéen avec le relais 4x400m. Et au fur et à mesure j’en ai fait plusieurs. Et c’est vrai que ça me plaisait bien parce qu’il y avait une notion de stratégie, de plus de gestion de course par rapport au 200m. 

Tout le monde disait que la préparation d’un 400m était quand même plus dur mais moi ça me plaisait bien de me mettre un cran au-dessus, de travailler dur, souffrir. Paradoxalement, c’est quelque chose qui me plaisait bien. 

Photo délivrée par l’athlète.

Comment décomposez-vous votre effort tout du long d’un 400m ? Quelle est votre stratégie au départ d’une course ? 

Il ne faut pas partir à bloc dès le départ mais il faut quand même bien se lancer, profiter de la poussée des starting-blocks pour pouvoir atteindre un peu notre vitesse maximale. Et ensuite, c’est d’essayer de maintenir cette vitesse maximale le plus longtemps possible. 

Il faut vraiment pousser assez fort au début pour se mettre sur le train. Et ensuite il faut être capable de ré accélérer au bon moment. C’est-à-dire soit à l’entrée du virage ou à la sortie du dernier virage pour pouvoir garder du jus un peu sur la dernière ligne droite. 

L’année dernière, vous devenez Championne de France du 400m en salle. Un titre que vous remettiez en jeu en février dernier et que vous êtes à nouveau aller décrocher en 52 secondes 74 centièmes. Quel souvenir gardez-vous de ce nouveau titre de Championne de France obtenu en février dernier ?

J’en garde un bon souvenir puisque ça reste un titre de championne de France et que je suis contente de l’avoir eu. Après, l’objectif de la saison c’était surtout les championnats d’Europe en salle qui suivaient juste après les championnats de France. 

Je voulais vraiment préparer les Europe avec les championnats de France Elite. Et je n’ai pas réussi à faire courir, à faire deux courses séries / finale de la manière dont je voulais. Je suis très exigeante et perfectionniste et j’aurai aimé faire un peu plus. 

Qu’est-ce qui différencie une course en salle d’une course en intérieur ? Bien que la distance reste la même, j’imagine que de nombreux paramètres changent et influent sur la course…

Oui. Bien que la distance reste la même, la piste en intérieur ne fait que 200 m. Du coup on fait deux tours. La piste est assez particulière, ça fait comme un vélodrome, les virages sont incurvés. Donc ce n’est pas tout à fait la même perfection de la manière dont on court.

Et puis surtout, il y a un rabat au bout de 150m. Ce qui fait que les 250 derniers mètres, on les court coude-à-coude avec les autres. Il faut savoir se rabattre, passer correctement en tête. 

Et le fait qu’il y ait des virages plus serrés qu’à l’extérieur, un petit peu comme il s’est passé sur mes championnats d’Europe où je ne me suis pas rabattue en tête et après c’était difficile de doubler. Puisque si on double dans les virages, on perd beaucoup de temps. 

Après, à l’extérieur, il y a des conditions météos qui peuvent aussi faire varier le chrono. La pluie et le vent surtout. Mais la grosse différence est que l’on reste dans son propre couloir alors qu’en salle on peut bagarrer avec les autres, on peut se prendre un peu les pieds dans les autres. C’est surtout ça la grande différence.  

Dans quels domaines avez-vous l’impression de pouvoir encore progresser ?

Moi, c’est surtout sur mon départ et la confiance que je peux avoir dans mon départ. Là c’est typiquement l’erreur que j’ai faite sur les séries des championnats d’Europe. C’est-à-dire que je n’ai pas su, malgré la forme du moment, partir fort pour pouvoir me rabattre en tête. Et après pouvoir gérer plus facilement ma course. Je me suis laissée déborder par les filles. J’étais complétement sur un faux rythme. Pas du tout mon rythme habituel. Je me rabats en dernière ou avant dernière et je suis incapable après de revenir. Même si j’avais les jambes. Dans la dernière ligne droite j’ai pu faire un sprint mais les filles ont déjà pris trop d’avance. 

Quels sont vos principales qualités en tant que sprinteuse ?

Une de mes qualités est vraiment le mental. Lors des phases d’entraînement je suis capable de faire mes entraînement correctement et de ne pas hésiter à me rentrer un petit peu dedans parce que ça ne me fait pas peur. Je suis vraiment très déterminée. 

Après, physiquement, j’ai la chance de ne pas beaucoup me blesser et j’ai une très bonne hygiène de vie. Ce qui joue énormément. 

Vous vous entraînez au club du SCO Angers Athlè. Tout d’abord, depuis combien de temps êtes-vous au sein de ce club ? Et quel regard portez-vous sur cette structure ?

C’est le club qui m’a fait grandir puisque c’est dans ce club que j’ai signé ma première licence d’athlétisme. C’est un petit club familial. Il y a une cohésion qui est vraiment très sympa et que je pense que je ne retrouverai pas forcément dans d’autres clubs. C’est ce que j’apprécie. Tout le monde se connaît. C’est agréable de se sentir soutenue par les autres membres du club. 

Vous devez également beaucoup à votre entraîneur Sullivan Breton. Que vous apporte-t-il sur le plan personnel et sportif ?

Il m’apporte surtout beaucoup sur toute la phase de préparation en amont de la compétition. Il me connaît très bien et il sait ce dont j’ai besoin. Il fait une énorme partie du travail on va dire. Puisque moi j’ai juste à exécuter le plan d’entraînement qu’il me donne. Et après c’est lui qui chapeaute les séances, qui gère la préparation. C’est vraiment lui qui fait le gros du travail. Si j’ai de la bonne volonté, c’est plus facile d’exécuter ce qu’il me donne. 

Après, sur une compétition en tant que telle, je suis plutôt autonome. Je sais ce que j’ai à faire. Lui, il est plus là en personne référente de confiance, sur qui je peux poser un regard et me dire que c’est bon, tous les feux sont au vert, on peut y aller. 

Les gros des conseils qu’il peut me donner sont donc surtout à l’entraînement. Une fois en compétition je sais ce que j’ai à faire et tout roule. 

Photo délivrée par l’athlète.

Il n’y a pas que sur le 400m que vous brillez. En atteste ce titre de championne de France obtenu sur 200m en salle en 2018. Est-ce facile de passer du 200m au 400m ? Qu’est-ce qui change dans la préparation et dans les efforts ? 

Je ne dirai pas que c’est facile parce que je ne pense pas que ce soit donné à tout le monde. Et d’ailleurs la plupart des coureuses de 200m vous diront qu’elles ne veulent pas passer sur 400m parce que c’est difficile.

Je dirai que c’est dû au plaisir que je prends en fait. C’était une décision personnelle de passer du 200m au 400m. Même si le 200m je ne le délaisse pas non plus. A partir du moment où c’était une décision personnelle, en accord avec mon entraîneur également, moi ça me conforte dans mon projet. Je prends toujours du plaisir sur les séances. Ce n’est pas un choix qui m’a été imposé. 

Ce n’est pas évident mais je prends du plaisir à faire les séances et peu importe ce qu’elles sont. C’est un choix qui s’est fait naturellement. Étant donné que les performances dernières ont suivies. Et ça rend le travail plus agréable.

Vous êtes également Médaillée d’argent au relais 4x100m lors des Championnats d’Europe Espoirs de 2017. Comment décrieriez-vous votre style lorsque vous êtes alignées en relais ? 

Je n’ai pas eu beaucoup d’expérience avec les relais 4x100m. Même si j’ai été remplaçante au relais Senior au championnat d’Europe de Berlin en 2018. Mais c’est vrai que, comme toutes relayeuses, on aime bien terminer le relais comme je l’avais fait au championnat d’Europe Espoirs. Bien-sûr, la course ne se joue pas que sur le dernier relais, mais disons que c’est là où toutes les lumières sont tournées car c’est la fin de la course. 

J’aimais bien aussi le deuxième virage qui correspond au troisième passage. Puisque j’aime bien le 200m, le virage c’est quelque chose que j’appréciais. 

Aujourd’hui, le Covid-19 frappe de plein fouet le monde entier. Comment cela influe sur vos entraînements ? Qu’est-ce qui a changé par rapport à avant ? Et est-ce que le public vous manque ? 

Ce qui a changé, c’est surtout par rapport à mes camarades d’entraînements. Parce que j’ai eu des phases d’entraînement depuis le début de l’épidémie où j’ai dû m’entrainer toute seule. Notamment sur le premier confinement. Même récemment avec le couvre-feu, ce n’est pas évident. Puisque je m’entraîne avec quatre autres garçons et certains sont étudiants, d’autres travaillent. Donc ce n’étaient pas forcément toujours possible pour eux d’être présents. Le gros point négatif c’était surtout ça. 

Après, il y a certains lieux d’entraînements auxquels je n’avais pas forcément accès. 

Et c’est aussi du stress un petit peu supplémentaire pour nous athlètes. Parce que pour chaque compétition on devait faire des tests PCR. Donc on évite de voir trop de monde parce que si notre test est positif, on ne va pas pouvoir courir. Par exemple pour les championnats de France Elite ou les championnats d’Europe, qui sont les gros objectifs de la saison, j’ai évité de voir ma famille, des amis. J’ai vraiment restreint pour limiter les risques. 

Pour ce qui est du public, c’est vrai qu’au début je me disais que ça n’allait pas forcément changer grand-chose à mes performances. Mais au fur et à mesure des compétitions, je me rends compte que c’est frustrant et c’est dommage. Parce qu’en fin de compte on ne court pas forcément que pour nous.

On court aussi pour le partage des émotions qu’on peut transmettre lors de ces moments-là. Et c’est délicat de voir qu’on ne peut pas le partager. On le partage qu’avec quelques photographes qui sont là dans la salle. Mais c’est un peu mort. Il n’y a pas d’encouragements, c’est un peu triste. Ça enlève de la joie au moment que l’on vit. 

Photo délivrée par l’athlète.

En parallèle de votre carrière de sprinteuse, on vous sait également très engagée dans lutte pour la sauvegarde de la planète. Depuis combien de temps êtes-vous engagée dans ce combat ? Quel message souhaitez-vous faire passer au gens pour les sensibiliser sur l’importance de la sauvegarde de notre planète ? 

J’en ai pris conscience il y a deux trois ans au fur et à mesure. J’en ai pris conscience dans mes démarches au quotidien. Quand je vais faire mes courses. Quand je jette mes déchets à la poubelle.

C’est venu naturellement, je me suis aussi renseignée. J’ai regardé sur les réseaux sociaux comment les gens en parlaient. Et ce qui se faisait autrement. 

Par exemple faire mes produits ménager moi-même, j’ai essayé de diminuer mes déchets chez moi. Je me dis que chacun peut faire un petit geste pour la planète.

Et si on est 60 millions à faire rien qu’en France, ça ne sera plus qu’un petit geste mais ça sera un gros geste de la part de tous les français. C’est le message à faire passer. 

Enfin, quels sont vos prochains grands objectifs ?

Mon prochain gros objectif, ça sera l’été prochain avec les Jeux Olympiques. Mon objectif est d’être finaliste sur le 400m. Et aussi avec les relais 4x400m féminin et mixte. 

Et ensuite l’objectif principal sera les Jeux de Paris. Mais pour ça on a encore un petit peu de temps (Rires). 

Propos recueillis par Alexandre HOMAR.  

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